|  Lundi 26 mars - Les “poilus” parcourent les rues dès 12  ans d'âge et clament leur indignation contre la loi Nazelles. " L'armée ça pue,  ça pollue, ça rend con ! ", proclament les pancartes qui horrifient les  patriotes. Les autres ne savent plus sur quel pied marcher, tel ce commissaire  de police qui assure les “menaçants” que lui-même a " des fils dans le défilé  ". Le Professeur Ringard avertit ses fidèles lecteurs qu'il compte vingt-quatre  petits enfants qui, que, quoi, dont, en fin de compte, il n'est pas sûr du tout  ...     Si ça  continue de ce pas martial, va plus rester que Tuttiquanta pour danser la polka  !     Mercredi  4 avril - Suite du débat Ministre de l'Instruction Publique/lycéens en grève.  Dans la cour du lycée Papi, Proviseur et Censeur, dressés de toute leur taille dans  le soleil d'avril, contemplent la cour comme le Corse à Austerlitz. Sur la  galerie au-dessus, circulent des élèves d'une Prépa qui leur lancent deux ou  trois pétards aux fesses. De Sottenville et Napo se retournent lentement,  dignement, lentement encore, par crainte que ça ne se déchaîne comme à  Gravelotte.     Jeudi 3 mai  - Aujourd'hui, dans une classe de préparation à Veto, réduite à l'approche des  concours par le soleil et les bourgeons du printemps, j'évoque quelques images  du Kenya d'Hemingway et les gentils fauves dont ils auront peut-être sauvegarde  quelque jour ; mais combien les passionne davantage le tour de cartes que je  leur soumets en fin de séance avec ce paquet usé qu'ils tripotaient sur une  table dehors devant la classe et que j'avais dû faire semblant de leur enlever  puisqu'ils faisaient semblant de ne pas vouloir entrer ; d'où promesse de  récompense, d'où pressant rappel de leur part : " la promesse, la promesse ! "  Et, pour finir, leur étonnement hors mesure, quasi enfantin, devant ces tours  de passe-passe d'un jongleur de quartier.     Vendredi  4 mai - En classe de 1re, le descendant d'un amiral connu passe au tableau mais  s'avère dans l'incapacité de retracer les péripéties de la bataille de  Trafalgar. Le descendant d'un grainetier non moins connu s'offre à raconter les  exercices acrobatiques de son aïeule avec Mèche Folle dans le cabanon du fond  du jardin à Bécon-les-Bruyères, dans l'espoir d'améliorer ainsi sa note de  français à partir de “choses vues”, comme écrivait Victor Patati - ou était-ce  Paul Patata ? ; ça ne saurait, en tous cas, être Saint-Exupéry qui fut  pourtant, un temps, fiancé à la Fille-Fleur et qui regrettait : " j'étais fait  pour être jardinier ! ", tandis que le rêve du prétendant de la belle était  d'être aviateur (pour se payer la binette du premier ?).     13  septembre - Avant de quitter le bateau et tandis que le Cydnus déborde  d'orgueil sous le poids des vaisseaux qu'il porte, le fier Quartier-Maître de  Sottenville adresse un dernier adieu aux parents des matelots restés sur son  Bateau Ivre, ou si l'on préfère : Louis, les animant du feu de son courage, se  plaint de sa grandeur qui l'attache au rivage. Larguez les amarres ? |